Réunis le 7 octobre par les Amis aquitains des Semaines sociales à Bordeaux, en amont de la rencontre à Lille sur le thème « Refaire société », Catherine Fabre, députée de la République en marche et Anne Brézillon, adjointe au maire de Bordeaux, ainsi que le pasteur Pascal Lefebvre, directeur d’un centre social, ont insisté sur la confiance, la confiance que les citoyens devraient avoir dans les institutions et la confiance qu’ils devraient avoir en eux-mêmes. C’était, pour les intervenants, une clef essentielle pour construire, voire réparer, la cohésion sociale. Avoir confiance en soi, en effet, c’est un premier pas pour aller vers les autres, participer à la vie d’un quartier, d’une association…
Cette nécessaire confiance ne semble pas aujourd’hui la chose la mieux partagée dans notre pays.
Vis-à-vis des institutions, d’abord. Et, souvent, pour de bonnes raisons. Deux événements récents en font la démonstration. L’incendie de Rouen de l’usine chimique Lubrizol illustre parfaitement la distance qui s’est instaurée entre la population et ceux qui incarnent le pouvoir. Ces derniers ont beau promettre la transparence totale, essayer de rassurer sur la nocivité des émanations de substances brûlées sur le site classé Seveso (donc, dans les têtes, synonyme de grave danger), ils n’ont pas convaincu. Ils ont été pris au piège de la communication en temps réel qui vise à éviter la panique tout en prenant des mesures de sécurité, alors que l’on ne connaît pas encore l’ampleur de la crise et, d’évidence, ses conséquences à moyen ou long terme. Dire qu’on ne sait pas, aujourd’hui, paraît impossible.
Même scénario à propos de l’attaque à Paris qui a coûté la vie à trois fonctionnaires de police et à l’auteur des crimes. Le ministre de l’intérieur s’est vu aussitôt accusé d’avoir trop vite écarté certaines hypothèses. L’enquête n’a pas encore livré toutes ses conclusions, mais il faudrait déjà avoir tranché. Ce qui n’empêche pas d’agir sur les failles et les dysfonctionnements que révèle cette affaire. D’emblée, un ministre est suspect de ne pas tout dire, de cacher des choses et donc immédiatement appelé à démissionner. Comment dès lors, imaginer que les citoyens puissent faire confiance à ce ministre pour agir et évier qu’un tel drame se reproduise ?
« La confiance ne se décrète pas, elle se gagne »
Les intervenants de Bordeaux ont raison. La confiance est indispensable au contrat qui lie un gouvernement aux citoyens. Et réciproquement. Sinon, comment espérer envisager un projet de société commun, auquel adhèrerait une majorité d’entre eux ? Mais la confiance ne se décrète pas, elle se gagne, se cultive. Qu’ils soient aujourd’hui à la manœuvre ou qu’ils piaffent dans l’opposition, tous les élus doivent le comprendre. Les détenteurs d’un pouvoir doivent exprimer leur confiance envers ceux qui dépendent d’eux ; ils doivent écouter, donner la parole, afin de pouvoir ensuite décider, au nom de ce pouvoir qui leur a été confié. La confiance ne fonctionne que si elle circule à double sens.
Le pasteur Lefebvre expliquait ainsi que le sens de notre vie se résume à deux questions : sur qui puis-je compter : ma famille, mes amis, mes copains du syndicat ou de mon club de foot, mon maire, le gouvernement ? Mais aussi (et la question a sans doute traversé beaucoup des Gilets jaunes) : est-ce que je compte pour quelqu’un ? Est-ce que je compte, moi, pour les autres ?
—-
Dominique Quinio, présidente des SSF
—-