Nous fêterons le 10 décembre, le 70ème anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948. Depuis, de multiples pactes, conventions et déclarations l’ont précisée et enrichie ; le monde associatif en a fait une de ses références fondamentales. Et pourtant, un nombre croissant de pays bafouent ces droits sans état d’âme et ceux qui les défendaient se font au mieux de plus en plus timides. Aux citoyens de prendre la relève.
Basée sur l’affirmation que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits », la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme est le plus beau texte sur lequel se soient accordés les Etats membres des Nations Unies. Il est bon de le lire et de le relire [1].
Certes, il ne s’agit que d’une Déclaration non contraignante ; « ce ne sont que de mots », disent les plus sceptiques. Mais, les mots, quand ils véhiculent des idées et des principes qui sont ressentis comme justes et vrais, font leur chemin et ont une force qui façonne notre manière d’imaginer des changements possibles et un autre futur. Les peuples des printemps arabes ne réclamaient-ils pas d’abord le respect de leurs droits ?
L’universalité de la Déclaration est contestée au nom de la religion ou des cultures[2]. Mais les victimes des violations de ces droits savent toutes qu’ils sont universels et le Haut Commissaire aux Droits de l’Homme Zeid Ra’ad Al-Hussein d’ajouter « Il n’y a que ceux qui violent les droits de l’homme qui trouvent des excuses dans les traditions, les cultures, les circonstances »[3].
En 1948, les gouvernements ont seulement donné à l’ONU la mission de « promouvoir » les Droits de l’Homme, pas celle de les faire respecter. Cependant, les Droits de l’Homme devenant un instrument de la Guerre Froide, ils ont accepté de négocier des pactes et des conventions et, s’ils les ratifiaient, de modifier leurs lois et règlements nationaux pour les rendre conformes aux dispositions de ces pactes et conventions[4]. Ils ont ainsi donné aux citoyens, aux associations et aux ONG la possibilité de leur rappeler les engagements internationaux qu’ils avaient pris et de faire pression pour que eux et les services publics les respectent.
Après la fin de la Guerre Froide, les ONG et associations se sont multipliées, particulièrement dans les pays de l’Est et dans les pays en développement. Celles relatives aux Droits de l’Homme ont partout joué leur rôle d’incitatrices des gouvernements à respecter leurs engagements. Dans leurs pays, elles ont fait des déclarations, organisé des pétitions et des manifestations, elles ont mené des actions en justice. Sur la scène internationale, elles ont dénoncé les violations qu’elles avaient constatées devant les diverses instances chargées de suivre la mise en œuvre des instruments des droits de l’homme.
Ces actions ont sauvé des vies, influencé des politiques, amélioré les conditions de vie des plus vulnérables ; échoué aussi. Elles ont valu aux militants moqueries, critiques, pressions financières, harcèlement et, en trop de pays, emprisonnement et tortures. Aujourd’hui, dans cette nouvelle période où nombre de politiques et de conseillers pensent qu’il n’est plus réaliste de considérer « les droits de l’homme comme fondement de la légitimité internationale »[5], c’est aux citoyens, de s’engager dans des associations et ONG et d’agir solidairement afin d’en préserver les valeurs.
—-
Par Yves Berthelot, rédacteur des SSF
—–Notes[1] La Déclaration universelle des droits de l’homme, Nations Unies, DUDH, 1948[2] L’Organisation de Coopération Islamique (OCI) a adopté en août 1990 La Déclaration du Caire sur les droits de l’homme en Islam qui soumet ces droits à la Charia[3] Interview parue dans Le Monde daté du 3 août 2018[4] Les principaux engagements internationaux relatifs aux droits de l’homme sont : le Pacte relatif aux droits civils et politiques, ICCPR, (1966) voulu par l’Occident et celui relatif aux droits économiques sociaux et culturels, ICESCR, (1966) voulu par le bloc de l’Est et les Pays en développement ; la convention sur l’élimination de toute forme de discrimination raciale, ICERD, (1965) et celle sur l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard des femmes, CEDAW, (1979) ; la convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants, CAT, (1984), celle sur les droits de l’enfant, CRC, (1989) et celle sur les travailleurs migrants et leur famille, ICMW, (1990). Après la guerre froide ont été adoptées la convention contre les disparitions forcées, CED, (2006) et celle relative aux personnes handicapées, CRPD, (2006) ainsi que des protocoles additionnels à diverses conventions.[5] Le Monde daté du mardi 21 août, éditorial