Replay : « Synode sur la synodalité, ce qui a bougé, ce qui est à bâtir.»
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Dossier Rencontres anuelles
Par Philippe Da Costa
Intervention donnée au cours de la session 2007 des Semaines Sociales de France, « vivre autrement pour un développement durable et solidaire ».
PHILIPPE DA COSTA, membre du conseil des Semaines Sociales de France.
Appel à définir ensemble un nouveau sens de l’environnement au développement durable :
Après le temps de la prise de conscience et celui du nécessaire dialogue voici venu le temps du que faire ? Une question que beaucoup ne voulait pas éluder.
L’urgence climatique et énergétique impose l’action.
Mais au-delà de la nécessité, il faut comprendre que loin de se résumer à une collection de contraintes techniques, le développement durable embrasse un nouvel art de vivre en société, un nouveau style de vie.
Les ateliers de samedi ont travaillé sur un certain nombre de propositions visant à inventer ce que l’on peut organiser du niveau local au niveau international. Cette synthèse nous permet de rendre compte de ces travaux.
Ces propositions s’inscrivent dans la tradition des semaines sociales et prennent en compte certaines mesures retenues dans le cadre du Grenelle, et pour certaines d’entre elles vont plus loin.
Leurs spécificités sont d’être sociales, éducatives, européennes et d’insister avant tout sur nos modes de vie.
Notre défi personnel et collectif est bien de vivre autrement, pour une société :
• économiquement durable, par une gestion plus sage ;
• socialement viable, pour une vie en partage ;
• écologiquement vivable, pour une terre en héritage
Mais plus concrètement, quelles sont les propositions des semaines sociales.
Le premier enjeu est pour nous celui de l’éducation au développement durable.
Cette éducation doit se fonder sur un déclencheur personnel, une prise de conscience gratifiante et ne peut être fondée sur la peur, le catastrophisme.
L’éducation au développement durable est un processus qui s’inscrit tout au long de la vie, elle engage la transmission familiale, l’intergénérationnel et les tiers lieux éducatifs.
Dans le prolongement de nos semaines sociales de 2004, nous proposons de mettre en œuvre l’expérimentation d’un service civique universel afin d’offrir à tous les jeunes une chance d’immersion dans la diversité des acteurs, et de découverte des exigences concrètes de la citoyenneté, en particulier dans le domaine de l’environnement et de la solidarité internationale.
L’éducation au développement durable doit être une éducation à l’interdisciplinarité, à la complexité, et se situer dans la transversalité. Elle ne pourra se faire qu’en favorisant l’expérimentation.
Dans ce sens l’éducation nationale doit s’ouvrir à de telles initiatives. Elle doit faire place en temps et en ressource à des espaces d’expérimentation intergénérationnelle ouverts sur le monde.
Pour toutes ces raisons le ministère de l’éducation nationale ne peut agir seul. Il doit impérativement faire place à des acteurs extérieurs.
Dans le domaine de l’alimentation, il est urgent de changer de modes de production et de consommation.
Au niveau individuel il s’agit d’inviter le consommateur à faire le choix de la proximité, des produits de saison, labellisés, équitables …
Au niveau de la restauration collective, il s’agit de favoriser l’utilisation de ces mêmes produits sans pénaliser financièrement les usagers et en particulier des familles.
De même, il serait utile de promouvoir des conditionnements plus simples et recyclables.
Nous invitons les chrétiens à organiser le 4 octobre, fête de saint François d’Assise, une journée de prière et de réflexion sur les modes de production et de consommation durables.
Au niveau des politiques agricoles :
Pour parvenir aux 20% d’agriculture biologique d’ici 2020, telle que proposé par le Grenelle, il faut prévoir un accompagnement technique et des financements pérennes ;
Au-delà, pour les 80% de produits qui ne seront pas bio, nous demandons la création d’un label Haute Qualité Environnementale, qui aille plus loin que celui l’agriculture raisonnée, et auquel des fonds de la Politique Agricole Commune pourraient être progressivement affectés.
Enfin, concernant l’annonce du grenelle de réduire de 50% l’utilisation des pesticides, nous demandons qu’elle soit atteinte dans 10 ans.
La ville, l’habitat, le transport
Dans le domaine de la ville, de l’habitat et du transport les initiatives sont très nombreuses, notamment, en ce qui concerne les transports collectifs et les modes de circulation douce.
Nous proposons de créer un pass-mobilité pour tous les modes de transport favorisant l’inter modalité (métro, bus, taxi, vélo …) et de favoriser les initiatives d’accès au transport pour les personnes les plus démunies, et nous sommes prêts en assumer solidairement les coûts.
Dans le domaine de l’urbanisme, il s’agit de densifier les zones habitées pour lutter contre les effets négatifs de l’étalement urbain, en privilégiant la mixité sociale par l’application plus stricte et plus pénalisante de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain. Dans ce sens, nous proposons que l’appellation « quartier durable », ou même éco quartier, soit conditionnée par le respect de la mixité sociale.
Par ailleurs, pour améliorer l’intelligence collective et peser réellement sur les décisions, nous proposons que le plus grand nombre possible de projets d’urbanisme et d’aménagement soit soumis à débat publique.
Pour les entreprises
Il faut envisager un nouveau cadre de gouvernance et des modes de régulation différents pour qu’elles puissent concilier leurs impératifs économiques légitimes et une gestion plus sage. C’est pourquoi, nous demandons la création d’un vrai cadre juridique de l’entreprise qui permette d’y inclure non seulement les actionnaires mais aussi le personnel, et toutes les parties prenantes, comme les collectivités locales.
Au niveau national, il faut créer les conditions d’un actionnariat stable, pour que les entreprises puissent inscrire leur choix de développement dans la durée.
Par ailleurs, nous reprenons la proposition de mettre en place un véritable statut du travailleur qui constituerait un moyen nouveau de concilier la mobilité du travail que le changement imposé par le développement durable va certainement accroitre et la nécessaire sécurité du travailleur.
En matière de responsabilité sociale des entreprises, nous proposons que les entreprises mettent en place des actions de formation au développement durable pour les salariés et que le champ d’application de la loi RSE soit étendu aux personnels des sous traitants.
Nous proposons également d’associer les organisations syndicales au choix raisonné d’indicateurs sociaux et environnementaux.
Enfin, nous invitons les chrétiens, les congrégations et les associations à faire choix d’une gestion attentive et socialement responsable de leurs ressources et de leurs biens.
L’eau constitue l’un des plus grands défis de l’avenir.
Il s’agit en premier de promouvoir une nouvelle culture de l’eau au niveau local et national pour briser l’indifférence des pays riches en eau. Nous invitons à une éducation à l’eau dès le plus jeune âge et, dans le prolongement, à susciter et soutenir dans chaque pays des forums de citoyens permettant de s’informer de se former et de donner la parole aux usagers.
De plus, nous souhaitons que s’impose l’idée dans chaque pays d’un minimum vital eau en invitant les gouvernants à mettre en place des investissements eau et des systèmes d’assainissement.
Nous invitons également à inscrire la solidarité comme devoir de justice des pays riches à l’égard des pays pauvres :
– nous invitons à faire connaître la loi Oudin du 27 janvier 2005 qui autorise les collectivités locales à participer à des actions de co-développement concernant l’eau et l’assainissement dans la limite de 1% de leurs ressources affectées au service de l’eau ;
– nous proposons que l’Etat et ou l’Union Européenne, ainsi que les opérateurs publics ou privés, abondent chacun pour leur part d’un montant égal aux actions engagées par les collectivités locales.
Dans le domaine de l’énergie.
De multiples engagements ont été pris, qui ne sont pas ou qui ne seront pas atteints, si nous ne modifions pas en profondeur nos modes de vie, nos habitudes de consommation.
Cela exige que chacun s’interroge sur ses choix personnels en commençant peut-être par ce qui est le plus proche de nous, l’habitat et les transports, qui représentent 80% de notre consommation énergétique.
Les ressources énergétiques étant limitées dans le temps, le juste partage de l’utilisation des ressources énergétiques et les choix technologiques doivent intégrer des dimensions temporelles, et géographiques. Ces choix d’usage doivent se faire en intégrant une démarche participative des individus, des corps intermédiaires et des autorités publiques.
Pour intégrer cette contrainte et en faire un atout, il faut passer du consommateur passif d’énergie abondante et bon marché à l’utilisateur actif et éclairé de services énergétiques adaptés à ses besoins.
Cela passe par une mise à disposition d’une information impartiale sur les emplois de l’énergie, notamment des énergies renouvelables comme les biocarburants.
Dans le cadre de responsabilité sociale, les entreprises doivent développer un nouveau modèle économique à faible impact carbone et nous les invitons à interroger leur système de prix pour intégrer un prix réel des matières premières et conclure avec les pouvoirs publics des contrats d’objectifs pour la compensation carbone.
Enfin, pour intégrer les dimensions géopolitiques, nous proposons de développer une approche énergétique européenne coordonnée (PEC), qui rejoindrait les fondements historiques de l’union européenne, en prenant en compte la dimension énergétique et climatique, à travers une approche de développement durable.
Dans le domaine de la géopolitique
Il faut mettre en place un nouveau mode de gouvernance du développement durable, en donnant plus de place aux pays émergents et aux acteurs non étatiques dans les organisations internationales.
L’enjeu est bien de réinventer un nouveau contrat social commun au niveau mondial et local pour envisager une société plus juste, un contrat basé sur des valeurs, des modes de coopération et des processus de décision communs, interactifs.
On assiste à une mobilisation croissante des opinions publiques en Europe et dans notre pays, comme lors du récent Grenelle de l’environnement. Mais aussi comme dans des pays qui ne prenaient pas en compte jusqu’à présent cette réalité. C’est le cas de certains pays émergents tel que la Chine et de quelques états d’Amérique.
Il convient d’accélérer cette mobilisation en favorisant l’accès de tous à l’expertise scientifique.
Il ne suffit pas de penser seulement des propositions nouvelles pour vivre autrement, il est nécessaire d’y adjoindre une éthique de l’action, un mode d’emploi du comment fait-on aujourd’hui pour définir cette nouvelle façon de faire société.
L’action passe par un éveil de la conscience de chacun :
Rien ne peut se faire sans une modification en profondeur des comportements individuels et des styles de vie. De la prise de conscience initiale à la modification des habitudes de chacun, il s’agit d’un véritable changement, d’une transformation totale et radicale.
La notion théologique et spirituelle de conversion prend là tout son sens, c’est une réorganisation globale de la vie selon des normes nouvelles et l’entrée dans une communauté différente.
Créer une nouvelle alliance ou agir ensemble
Ce sont nos choix en tant que citoyens et consommateurs qui légitiment les décisions des institutions et des entreprises. C’est une véritable pédagogie du choix qui permettra de fonder un nouveau contrat social. De nouvelles règles de fonctionnement et de décision doivent être mises en place pour faire société, favoriser une évolution de la croissance, préciser l’articulation entre la responsabilité individuelle et responsabilité collective.
A la lumière de ces apports, que nous est-il demandé de faire aujourd’hui ?
• d’établir un nouveau mode de relation entre l’homme et la création qui ne relève plus d’une domination de l’un par l’autre
• de construire une société durable, soucieuse de justice et fondée sur un mode de vie plus simple. Lutter contre la pauvreté en pensant différemment la répartition des bénéfices et les prises de décision concernant cette répartition
• Construire une histoire commune en inscrivant nos choix et nos projets individuels dans un horizon collectif..
• Créer une culture du développement durable, un autre mode de vivre ensemble fondé sur le sens.
Il s’agit d’habiter la terre autrement comme une exigence éthique individuelle et collective
Les propositions qui ont fait l’objet d’une délibération en atelier :
1. Reflètent notre engagement de chrétiens sociaux, au cotés de la société française, pour une démarche de développement durable. Nous voulons en être solidaires, nous y reconnaissons le souffle de l’enseignement social chrétien ; nous soulignons aussi que pour que cette démarche réussisse, il faut plus de solidarité, entre Français, Européens et avec les peuples du monde.
2. Elles sont une invitation d’abord adressée aux chrétiens, pour passer du « je » au « nous ». Chacun peut en effet y souscrire selon ses possibilités et sa situation, au plan personnel, mais cet engagement individuel est en même temps un appel à une action collective, impliquant les entreprises et les pouvoirs publics à tous niveaux.
3. Elles expriment aussi un message positif qui va au-delà du monde chrétien. Il ne faut pas, selon nous voir dans le développement durable seulement la gestion de la pénurie ou un manque à consommer ou à produire. Il ne s’agit pas de freiner pour durer plus longtemps, mais de saisir l’opportunité qu’offrent de nouveaux styles de vie pour le développement de relations humaines plus fraternelles, plus diversifiées, plus accueillantes aux potentialités créatrices de chacun.
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La doctrine sociale sur le fil
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