Des chrétiens se lèvent tôt

Le couvre-feu ne permet pas la traditionnelle vigile pascale au cours de laquelle l’Eglise célèbre traditionnellement le baptême des adultes. C’est donc avant le lever du jour, à l’heure ou Marie Madeleine est arrivée devant le tombeau du Christ, à 6h30 le dimanche de Pâques dans de nombreuses paroisses, que le cierge pascal est allumé au feu qui flambe devant les églises, illumine la nef, et y précède les catéchumènes. Bien sûr les religieux ont toujours su rythmer leurs jours et leurs nuits par la liturgie, mais pour le catéchumène, pour sa famille et ses proches souvent surpris par sa démarche, et pour le paroissien de base qui va les accompagner, se lever avant l’aurore pour célébrer est un geste exceptionnel. Il sera repéré par les voisins de ces églises. Des statisticiens nous ont dit la fin d’une pratique chrétienne structurant notre société. Constat nécessaire, mais constat insuffisant. Des sociologues ont décrit l’émiettement ou la disparition de plusieurs mouvements spécialisés d’action catholique qui ont nourri la pensée et encadré l’engagement de beaucoup d’entre nous ; cette prise de conscience là peut être douloureuse.

Mais la pandémie a fait basculer bien des certitudes et renouvelle nos questions: en 2008 la crise financière- et le mot crise était alors pertinent- avait démontré qu’un retour à la normalité d’avant était possible. Aujourd’hui la souffrance des victimes et de leurs proches efface les certitudes fondées sur les dynamiques individuelles censées nourrir l’enrichissement collectif : le mal commun nous oblige à repenser le bien commun. Le retour du spirituel dans les débats publics exprime une interrogation collective. Y répondre c’est, comme le font les Semaines Sociales qui travaillent sur nos rêves d’avenir, continuer à tenter l’analyse et débattre entre disciplines, entre cultures. Y répondre c’est aussi s’emparer de la mutation numérique de nos relations et apprendre à dominer l’outil au lieu d’en être instrumentalisé. Si l’expression « action catholique » est désuète, le lien entre engagement et spiritualité redevient un besoin partagé. Certes la pratique religieuse s’est effondrée mais ce dimanche à l’aube quelques centaines d’adultes vont s’éclairer au cierge pascal, sachons leur proposer un engagement collectif digne de leur choix individuel.

Philippe Segretain, membre du CA

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