La garantie jeune : une bonne nouvelle

Une hirondelle ne fait pas le printemps, surtout en ces temps où les hirondelles comme le printemps se font rares. Pourtant il faut saluer comme une nouvelle prometteuse le succès européen et français de la « garantie jeune ». Tout a commencé en 2013, au creux d’une crise économique qui ne donnait guère de signes de rémission. Dans l‘ensemble des économies européennes, les nouveaux entrants sur le marché du travail peinent à s’y faire une place. Le phénomène décrit par l’OCDE comme celui des NEETS[1], jeunes ni en emploi, ni en formation prend une ampleur alarmante et annonce de graves irréversibilités pour l’avenir. Pour les moins qualifiés, une entrée ratée sur le marché du travail peut être définitivement pénalisante. Cela donne l’occasion au couple franco-allemand en mal de leadership de réagir en entraînant l’ensemble du Conseil européen à adopter un engagement formel : les gouvernements devront veiller à ce que tout jeune de moins de 25 ans se voit proposer au moment de la cessation des études obligatoires, dans un délai de quatre mois : soit un emploi de qualité, soit une formation continue, soit un stage en entreprise, soit un contrat d’apprentissage. La garantie jeune n’est donc pas la garantie d’un emploi tant s’en faut, mais au mois celle de la mise à l’étrier.

En début 2018, les résultats mesurables sur trois années complètes d’application sont positifs. Dans tous les Etats de l’UE, y compris ceux les plus touchés par le chômage de longue durée, la part des NEETS a reculé de manière significative et parfois spectaculaire, comme en Irlande, en Espagne et au Portugal. Certes, la garantie a été accordée de façon plus ou moins extensive, sous des conditions plus ou moins strictes. Mais partout les crédits européens dédiés à la mise en œuvre de la garantie[2] ont été largement utilisés parfois de façon innovante, comme dans le cas de la France.

Dans notre pays, la « garantie jeune » mise en œuvre en octobre 2013 est confiée pour l’essentiel aux missions locales de l’emploi[3]. Celles-ci proposent aux jeunes de 16 à 24 ans sans travail et en grande précarité un accompagnement personnalisé, concrétisé dans un contrat assorti d’une rémunération modique[4] mais capable d’aider à surmonter des blocages tels que permis de conduire, aide au logement autonome, frais de transport. Sans doute le plus innovant dans la démarche des missions locales a-t-il consisté dans une « médiation active « entre les jeunes et les entreprises de leur proximité pour aider à surmonter les réticences réciproques à l’embauche, à l’ouverture d’un contrat d’apprentissage ou d’un stage. En France, les acteurs de la lutte contre la pauvreté considèrent que la garantie jeune fut un succès[5]. Les conclusions du rapport du CESE remis au gouvernement en mars 2017 sous la responsabilité d’Antoine Dulin et Cécilia Vérot préconisent son approfondissement et son extension. La « garantie jeune plus » constitue désormais l’une des dispositions les plus significatives parmi celles soumises en mars dernier au gouvernement dans le cadre de la consultation sur un Programme pluriannuel de prévention et de lutte contre la pauvreté des jeunes[3].

Lors du sommet social de Göteborg, les chefs d’Etat de l’UE se sont accordés unanimement sur la perspective d’un nouveau socle de droits sociaux européens[6]. La généralisation de la garantie jeune particulièrement en direction de ceux d’entre eux les plus éloignés du marché du travail pourrait constituer le premier des droits sociaux européens de nouvelle génération.

Jérôme Vignon

[1] « Neither in employment nor in education or training ne soit ni en emploi, ni en formation ou apprentissage.

[2] 3,2 milliards d’Euros sur 5 ans au titre de l’initiative jeune, s’ajoutant à 3,2 milliards tirés des crédits déjà prévus sur le Fonds social europée

[3] Voir le rapport d’évaluation

[4] Allocation de soutien vers l’autonomie, attribuée sous condition de ressources, d’un montant proche du RSA.

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