Dossier Fin de vie

Un pas de plus vers l’aide active à mourir

Fallait-il attendre autre chose de la Convention citoyenne sur la fin de vie que cet accord largement majoritaire pour une évolution de la loi en faveur d’une aide active à mourir, issu d’un vote solennel concluant, le 19 février, la sixième session de travail des 184 Conventionnels tirés au sort ? Ils ont encore trois séances pour peaufiner leurs recommandations, mais les jeux sont faits : 72% se déclarent favorables au suicide assisté, 66% à l’euthanasie. A noter que, sur beaucoup de questions, un petit nombre de votants a préféré s’abstenir, signe que le sujet est complexe et le positionnement individuel délicat.

Il était évident qu’à la question posée « le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées », il serait répondu non : quelle loi pourrait, de fait, répondre à la diversité des cas vécus en fin de vie. Et l’on pouvait prédire que l’évocation d’éventuels changements pouvant être introduits dans la loi amènerait une réponse positive.

On pourra contester le principe et les méthodes de la Convention, mais le débat s’y est tenu, comme il s’est tenu dans nombre de réunions en régions et, notamment, dans les milieux catholique (1) ; il fut en partie relayé dans les médias, conduisant peut être une partie des citoyens à aller plus loin dans leur propre réflexion, même si les sujets sur la retraite, le coût de la vie, la guerre en Ukraine ou le séisme turc les préoccupaient davantage.

A lire le détail du vote, certains points pourtant devraient les inquiéter. Le fait qu’une majorité soit favorable à ce que des mineurs puissent être aidés à mourir, ou qu’il ne soit pas nécessaire que la personne qui en fait la demande soit consciente et apte à dire son consentement… Comment ne pas s’étonner également que l‘opposition qu’expriment nombre de soignants ne les alerte pas ? Qu’est-ce que cette liberté revendiquée qui, pour s’exercer, nécessite la collaboration d’un tiers, pour juger de la légitimité de la demande, pour prescrire le médicament létal, pour l’administrer…

Il semble que la peur de souffrances insupportables, le sentiment de déchéance physique soient au cœur des positions exprimées. Une peur largement partagée, y compris par ceux qui ne souhaitent pas une évolution de la loi. Personne ne peut dire en effet comment il réagira le moment venu ; mais une chose est sûre : des soins palliatifs mieux organisés, présents sur tout le territoire peuvent répondre à ces peurs. C’est là que réside la priorité des priorités.

Il appartiendra au gouvernement et aux législateurs de répondre aux propositions de cette convention citoyenne. Si la loi devait changer, elle sera à coup sûr, dans un premier temps, très encadrée et restrictive. Jusqu’à quand ? Mais tout ne se jouera pas dans l’hémicycle. A chacun de nous de réfléchir à ses propres choix mais surtout de veiller sur les souffrants, les grands vieillards, les personnes gravement handicapées, psychiquement fragiles, à celles qui crèvent de solitude et ont le sentiment de ne compter pour personne, qu’elles soient proches de nous ou plus lointaines. Leur choix de vivre dépend aussi de nous.

[1] Les SSF proposent une après-midi de réflexion le samedi 11 mars, accompagnés par divers intervenants et laissant une part importante aux échanges. Informations et inscriptions : www.ssf-fr.org/page/2171376-conference-debat-fin-de-vie-parlons-en

Dominique Quinio, présidente d’honneur des SSF

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