Jeudi 3 juin, dans le magnifique grand auditorium des Bernardins, trois familles syriennes étaient accueillies, et saluées par les représentantes du Ministère de l’Intérieur et de l’Office Français d’Immigration et d’Intégration. Dans la tribune publiée en avril et actualisée aujourd’hui sur le site des SSF, Valérie Reigner, Présidente de la communauté de Sant’Egidio en France et membre de notre Conseil d’administration, décrit une œuvre exceptionnelle, nourrie tant par une foi dynamique en la dignité du plus pauvre, l’exclu dans son camp au Liban, que par une remarquable compétence logistique. Avec la confiance des pouvoirs publics, Sant’Egidio a su identifier ces personnes dramatiquement vulnérables, et les accompagner de leur camp de réfugiés jusqu’en France.
Je représentais les Semaines Sociales à la conférence de presse qui décrivait cette opération. Nous sommes partenaires de Sant Egidio dans le protocole d’accord pour la mise en œuvre de cette opération d’accueil solidaire, signé par le ministre de l’intérieur et le ministre des affaires étrangères.
Avant que ne débute la conférence de presse les familles se présentent : venues d’Alep, d’Idlib, elles ont tout perdu en Syrie; et les années passées au Liban, pendant lesquelles les adultes furent le plus souvent au chômage, furent dures. Une expression liée à une vision géostratégique un peu dépassée s’impose: «le Proche Orient ». Ces hommes, ces femmes, venues de terres qui furent si présentes dans notre histoire, et dans l’histoire récente de notre pays, nous sont proches, et la Méditerranée, dramatique pour tant des leurs, nous relie.
La lecture du protocole d’accord signé par notre Présidente peut étonner. Un texte signé par deux ministre parle d’emblée de nous : «La société civile peut…prendre toute sa place…dans le développement de nouvelles modalités d’accueil sur le territoire»; puis il est écrit que les couloirs humanitaires sont d’abord constitués par l’identification puis l’accompagnement des personnes qui recevront l’asile, ce dont s’acquitte remarquablement Sant’Egidio, puis par un «accueil diffus» sur tout le territoire national permettant «l’intégration à l’échelle des familles, des quartiers, des villages» Et c’est là que nous pouvons intervenir, avec notre capacité à mobiliser de nombreux citoyens, notre réseau de bénévoles.
Depuis 2017 plus de 500 personnes en provenance du Liban ont été accueillies en France ; la Conférence des Evêques, la Fédération Protestante, le Secours Catholique, de nombreux relais associatifs ou diocésains l’ont permis. Aujourd’hui nous sommes signataires de ce nouveau protocole, écrit comme un chapitre ambitieux de notre plateforme du bien commun. Il nous faut donc mettre en œuvre des parcours d’intégration sociale et culturelle pour ces familles qui partent à Nantes, à Pontarlier, en Andorre, les aider à acquérir des compétences linguistiques, à accéder au travail, aux droits sociaux. Le cadre juridique et institutionnel organisé par ces couloirs humanitaires sort les personnes accueillies d’une angoisse délétère; elles sont donc prêtes à se mobiliser. Encore nous faut-il imaginer l’aide que chacun d’entre nous, nos antennes, nos réseaux associatifs vont pouvoir proposer en utilisant les contacts rappelés sur le site des couloirs humanitaires (1) , afin que cette action puisse se poursuivre et s’amplifier.
Fratelli Tutti a rappelé notre responsabilité, nous avons reçu, analysé, commenté de texte. Ce travail d’appropriation de la pensée sociale chrétienne nourrit l’histoire des Semaines Sociales. Aujourd’hui une association partenaire a besoin de notre présence sur tout le territoire, de notre capacité à nous mobiliser, pour décupler ses propres moyens d’action. Responsables certes, et capables ? Nous sommes attendus.
Philippe Segretain, membre du Conseil des SSF
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