Notre réflexion sur les changements radicaux de nos comportements environnementaux doivent se nourrir d’un travail sur nos clivages sociaux.
La qualité des échanges lors de la session des Semaines Sociales « Écologie, préparons-nous à un changement radical », sur un thème dont la gravité n’a pas été cachée, a créé entre participants une riche complicité ; et, malgré la difficulté des défis individuels et collectifs à relever, ils ont pu quitter l’autre dimanche l’auditorium de l’Institut Catholique de Lyon, ou bien leurs écrans, avec un certain optimisme : ce collectif a analysé sérieusement, proposé lucidement, débattu calmement, et a pu se sentir prêt à agir.
Et puis les nouvelles du soir tombent : un meurtre terroriste à Paris, un drame mortel entre supporters de deux équipes de foot, des rixes et la mort de deux jeunes … vivons-nous dans un ilot serein distant d’un monde marqué par la violence civile ? Trois semaines d’émeutes au début de l’été nous ont rappelé les ruptures territoriales, sociales, culturelles, les tensions économiques, que toute action politique, et tout particulièrement les choix porteurs d’une réelle transition écologique, doivent intégrer.
La première réponse à cette violence relève du maintien de l’ordre, nécessaire, sans oublier un regard lucide sur la part de violence que créent et diffusent à l’infini les espaces numériques. La collectivité doit disposer des moyens juridiques qui permettent de gérer notre recherche de sécurité. Mais cette violence civile pose à l’arme policière les questions que toute guerre pose aux combattants : combattre c’est permettre de rétablir la Paix. Or viser à rétablir la paix ne peut se limiter à s’emparer des plus violents. Punir ? Notre sécurité l’exige, et la justice structure la punition, mais au-delà comment guérir ? Ce drame récent à Paris ouvre à nouveau le débat. Le sujet ne peut être réduit à la polémique politique. Et l’éthique de la politique sécuritaire est un sujet à travailler, avec les professionnels de ces dérives.
Oui il nous faut analyser et débattre les conditions de toute nécessaire mutation liée à notre environnement, mais, malgré ses difficultés, cette recherche ne peut être un entre soi. Le pays se déchire, cette violence le dit, notre réflexion et nos propositions sur les changements radicaux de nos comportements environnementaux doivent intégrer et se nourrir d’un travail sur nos clivages sociaux. Malgré quelques exemples heureux d’espaces de débats tendus mais sans heurts autres que verbaux, la radicalité des mutations environnementales peut nourrir la violence sociale
La nécessaire défense de la paix civile exige des forces de l’ordre qu’elles sachent dépasser la seule logique de l’efficacité immédiate de leur action- logique dans laquelle voudraient les enfermer certains responsables politiques-et qu’elles communiquent aussi sur leur valeur ajoutée. Plus largement la réponse politique aux contraintes et tensions économiques et sociales que la transition écologique entraine, doit faire vivre- c’est-à-dire exprimer et défendre en termes accessibles à tous, ce difficile équilibre entre respect de la personne et défense de la communauté, ce bien commun. Une éthique citoyenne.
Philippe Segretain, décembre 2023.
