Dossier La Tribune du Christianisme social

La tribune : Au nom des enfants

Toutes les conséquences de la pandémie sont loin d’être tirées, bien sûr. Mais, déjà, dans le rapport sur l’année 2020 rendu public le 19 janvier par l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), deux faits marquants sont à retenir : l’augmentation des décès, la baisse des naissances.

Le nombre de décès a augmenté en 2020: 54 000 personnes de plus sont mortes par rapport à 2019 ( soit plus 9%), l’augmentation la plus forte depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Ce différentiel concerne essentiellement des personnes âgées de plus de 65 ans; il n’existe pas chez les plus jeunes, les confinements et le télétravail ayant épargné des victimes de la route ou d’accidents du travail. En 2020, donc, l’espérance de vie en France a reculé de 6 mois chez les hommes, de 5 mois chez les femmes.

Le rapport constate en parallèle une baisse importante du nombre de naissances, sans qu’elle puisse être imputée totalement à la Covid 19 ou à la crise sociale qui l’accompagne. Le nombre de naissances, dans notre pays, longtemps présenté comme une exception, diminue régulièrement ; la France n’a enregistré en 2020 que 740 000 naissances, le chiffre le plus bas depuis 1945. Le taux de fécondité est passé de 1,86 enfant par femme, en 2019, à 1,84, en-dessous donc du seuil de renouvellement des générations. Pourtant, selon une étude de l’institut Kantar pour l’Union nationale des associations familiales (Unaf), le nombre d’enfants désirés par les Français (trois) reste toujours à un niveau plus élevé que le nombre de bébés mis au monde.

Les causes de ce décalage sont multiples. La France prend de l’âge et, avec ce vieillissement global, le nombre de femmes en âge de procréer diminue. L’installation tardive dans une vie de couple stable, l’allongement des études, la précarité devant l’accès à l’emploi font que les femmes ont leur premier enfant de plus en plus tard (30 ans en moyenne), au risque de devoir affronter des problèmes de fertilité. L’arrivée d’un troisième enfant pèse sur les finances familiales (logement, voiture, modes de garde…) ; l’un des conjoints, la femme le plus souvent, peut être amené à réduire son temps de travail.

La politique familiale, longtemps vue en France comme un facteur différenciant par rapport au pays voisins et toujours, par comparaison, généreuse, semble avoir perdu de son effet. En outre, certaines mesures – modulation des allocations familiales selon les revenus, baisse du quotient familial, réforme du congé parental – sont apparues comme des coups portés aux familles nombreuses. Enfin, le surinvestissement sur l’enfant, aujourd’hui désiré, programmé, laisse penser aux jeunes parents qu’ils ne pourraient pas accompagner au mieux des enfants plus nombreux.

Mais un autre facteur est peut être en train de changer la donne. Les jeunes générations sont très sensibles au sort de la planète et l’idée de la surpopulation émerge dans bien des discours écologistes, comme pesant sur les ressources de la Terre. Les démographes, d’ailleurs, jugent que les naissances actuelles sont le fait de femmes nées dans les années 80, qui rêvent toujours d’avoir trois enfants. Qu’en sera-t-il pour les jeunes filles nées dans les années 1990 ? En outre, et là revient en force la pandémie, les incertitudes, l’inquiétude sanitaire et sociale, les discours sur l’effondrement n’incitent pas à donner la vie.

« Quelle responsabilité que la nôtre ! C’est le sens de l’engagement auquel nous sommes tous appelés. Redonner confiance, croire que l’on peut construire un monde accueillant pour les enfants du monde. »

Quelle responsabilité que la nôtre ! C’est le sens de l’engagement auquel nous sommes tous appelés. Redonner confiance, croire que l’on peut construire un monde accueillant pour les enfants du monde. « Bâtissons un monde meilleur, que le soleil puisse briller sur tous nos frères et sœurs (…) L’amour vaincra », C’est ce qu’ont chanté pour nous deux jeunes musiciens du groupe les Guetteurs lors de la rencontre Jeunes-SSF, le 29 janvier dernier. Prenons-les au mot.

Dominique Quinio, Présidente des Semaines sociales de France

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