L’immigration en France : analyse chiffrée

L’immigration est à la fois un acte individuel et un phénomène collectif. Je n’aborderai que cette deuxième dimension avec des chiffres provenant de l’INSEE et concernant l’année 2014. L’information sur l’immigration est incomplète et imprécise. L’immigration illégale est mal connue. La France est un pays d’immigration ancienne. Ailleurs en Europe l’immigration n’est devenue importante que récemment. Les taux d’immigration ont beaucoup augmenté en Europe Occidentale au long des 30 ou 40 dernières années. Le taux français, qui partait de plus haut, n’a évolué que modérément. Aussi la position relative française a changé : le taux français est maintenant plus faible que la moyenne de la première Europe à 15. Le phénomène s’est aggravé récemment ; ainsi en 2016 l’Allemagne a accepté 445,000 Syriens et la France 35,000. L’impact de l’immigration passée reste plus important en France.

En France, la population immigrée, dont une partie a acquis la nationalité française, est de l’ordre de 9% de la population totale. Environ un tiers provient d’Europe et celle-ci est âgée. Près de la moitié provient d’Afrique ou de Turquie ; elle est jeune et croissante. Les personnes nées en France, dont un parent ou les deux sont immigrés représentent environ 11% de la population. Ainsi le total de la population d’origine étrangère représente environ 20% de la population. La population immigrée et descendante d’immigrés est très concentrée d’abord en Île-de-France, puis en PACA, en Auvergne, Rhône-Alpes et en Occitanie. Ainsi, 56% des immigrés d’origine africaine subsaharienne résident en Île-de-France ainsi qu’un tiers des immigrés maghrébins.

La moitié des parents immigrés sont européens (Italie, Espagne, Portugal,…). Leurs enfants se sont intégrés : leur situation, notamment leur participation au marché du travail, est identique à celle des personnes dont les deux parents sont français. Il n’en est pas de même pour ceux dont un parent au moins est d’origine africaine. Ceux-ci sont en moyenne moins diplômés, moins rémunérés et beaucoup plus souvent au chômage. Leur moins bonne performance s’explique-t-elle par leurs caractéristiques observées autres que leur origine ? Celles-ci, telles l’âge, le diplôme, les caractéristiques des parents ont un effet sur la scolarité, sur l’accès à l’emploi, sur le salaire, Elles expliquent un écart en défaveur des immigrés. Pour le diplôme et le salaire, l’écart expliqué coïncide à peu près avec l’écart constaté. En revanche, l’écart expliqué n’est qu’environ le tiers de l’écart constaté pour le taux de chômage. L’essentiel de l’écart, en gros un doublement du taux de chômage, n’est pas expliqué par les caractéristiques observées. Faut-il incriminer une discrimination à l’embauche ? Les enquêtes d’opinion vont dans ce sens ; elles révèlent un sentiment de discrimination basée sur l’origine chez les descendants d’immigrés venus d’Afrique. On ne peut cependant en conclure que l’écart inexpliqué résulterait seulement de cette discrimination même si celle-ci existe et y contribue. La liste des caractéristiques observées, suffisante pour analyser la scolarité ou le salaire, ne contient pas assez d’éléments concernant le capital humain et social ou la nature des liens avec le pays d’origine. Si l’on fait l’hypothèse que ceux-ci sont corrélés avec le fait d’habiter en ZUS, on comprend mieux pourquoi 35% des étrangères de 25 à 49 ans sont en emploi en ZUS contre 60% des étrangères de même âge vivant dans les villes englobant les ZUS. Tout cela témoigne de la difficulté de la société française à intégrer certains des immigrés.

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Paul Champsaur, rédacteur des SSF

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